Titre Précedent Suivant Sommaire Index | VIII. — Le sentier à travers la forêt. — Les enseignements du frère aîné. — La grande Ourse et l'étoile polaire

VIII. — Le sentier à travers la forêt. — Les enseignements du frère aîné. — La grande Ourse et l'étoile polaire

Le frère aîné doit instruire le plus jeune par son exemple et, s'il le peut, par ses leçons.
A l'ouest, derrière les Vosges, le soleil venait de se coucher ; la campagne s'obscurcissait. Sur les hautes cimes de la montagne, au loin, brillaient les dernières lueurs du crépuscule, et les noirs sapins, agitant leurs bras au souffle du vent d'automne, s'assombrissaient de plus en plus.
Les deux frères avançaient sur le sentier, se tenant par la main ; bientôt ils entrèrent au milieu des bois qui couvrent toute cette contrée.
Julien marchait la tête penchée, d'un air sérieux, sans mot dire. — A quoi songes-tu, mon Julien ? demanda André.
— Je tâche de bien me rappeler tout ce que disait le garde, fit l'enfant, car j'ai écouté le mieux que j'ai pu.
— Ne t'inquiète pas, Julien ; je sais bien la route, et nous ne nous égarerons pas.
— D'ailleurs, reprit l'enfant de sa vois douce et résignée, si l'on s'égare, on reviendra tranquillement sur ses pas, sans avoir peur, comme le garde a dit de le faire, n'est-ce pas, André ?
— Oui, oui, Julien, mais nous allons tâcher de ne pas nous égarer.
— Pour cela, tu sais, André, il faut regarder les étoiles à chaque carrefour ; le garde l'a dit, je t'y ferai penser.
— Bravo, Julien, répondit André, je vois que tu n'as rien perdu de la leçon du garde ; si nous sommes deux à nous souvenir, la route se fera plus facilement.
— Oui, dit l'enfant ; mais je ne connais pas les étoiles par leur nom, et je n'ai pas compris ce que c'est que le grand Chariot.
— Je te l'expliquerai quand nous nous arrêterons.
Tout en devisant ainsi à voix basse, les deux frères avançaient et la nuit se faisait plus noire.
André avait tant étudié le pays toute la journée, qu'il lui semblait le reconnaître comme s'il y avait déjà passé. Malgré cela, il ne pouvait se défendre d'une certaine émotion : c'était la première fois qu'il suivait ainsi les sentiers de la montagne, et cela dans l'obscurité du soir. Toutefois c'était un courageux enfant, et qui n'oubliait jamais sa tâche de frère aîné : songeant que le petit Julien devait être plus ému que lui encore en face des grands bois sombres, André s'efforçait de surmonter les impressions de son âge, afin d'enhardir son jeune frère par son exemple et d'accomplir courageusement avec lui son devoir.
A un carrefour il s'arrêtèrent. André regarda le ciel derrière lui.
— Vois, dit-il à son frère, ces sept étoiles brillantes, dont quatre sont en carré comme les quatre roues d'un char, et trois autres par devant, comme le cocher et les chevaux : c'est ce qu'on appelle le grand Chariot ou encore la grande Ourse ; non loin se trouve une étoile assez brillante aussi, et qu'on voit toujours immobile exactement au nord : on l'appelle pour cela l'étoile polaire. Grâce à cette étoile, on peut toujours reconnaître sa route dans la nuit. La vois-tu bien ? Elle est juste derrière nous : cela prouve que nous sommes dans notre chemin ; nous marchons vers le sud, c'est-à-dire vers la France.
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L'ÉTOILE POLAIRE ET LA GRANDE OURSE. — Il est utile d'apprendre à connaître dans le ciel les étoiles qui forment la constellation du grand Chariot ou grande Ourse. Près d'elles on aperçoit l'étoile polaire, qui marque exactement le nord et indique la nuit les points cardinaux.
André, qui ne négligeait point les occasions d'instruire son frère en causant, lui enseigna aussi vers quel point la lune se lèverait bientôt, et, à la pensée qu'elle allait éclairer leur route, les enfants se réjouirent de tout leur coeur.